La Muse endormie de BRANCUSI

 

Le thème de la Muse endormie occupe une place majeure dans l’œuvre du grand sculpteur Constantin Brancusi (1876-1957). Il en réalisera plusieurs variations qui seront chaque fois des œuvres originales sur le même thème et non pas des répliques ! Ainsi, extrêmement raffinée, cette sculpture en bronze poli de 1909-1910 n’est pas sans évoquer certaines figures issues des arts asiatiques que Brancusi a pu découvrir au Musée Guimet à Paris. Elle est l’aboutissement d’une série d’études réalisées en 1908-09 pour faire le portrait de la baronne Renée Frachon. Mais ici le sculpteur dilue toute expression dans la forme ovale de la tête. Bien que le type défini pour cette Muse endormie variera peu dans ses reprises ultérieures.

La vision de Brancusi.

L’association entre le thème de la femme et le thème du sommeil est ancienne. Elle revient en force au XIXème siècle. Brancusci en renouvelle le traitement. Car, il s’agissait habituellement d’une peinture ou d’une sculpture d’un buste de femme. Or, il réalise la sculpture d’une tête couchée sans corps, qui peut évoquer un masque. Ainsi, il efface les traits du visage pour mettre en valeur sa forme ovoïdale. L’arête du nez prolongée par la courbe des sourcils, les yeux clos et la bouche ouverte, donnent à cette œuvre un caractère énigmatique.

La Muse endormie est, à l’origine, le visage de la Baronne Frachon dont il a déjà réalisé plusieurs portraits en 1908-09.

Portrait de femme (La Baronne Renée Frachon) , vers 1910. Support : pierre. Taille : 29,2 x 18,4 cm.

Interprétation.

Avec cette œuvre, toute l’expression se dilue dans la forme ovale de la tête. Ainsi, le visage semble être une nouvelle naissance, plus spirituelle, d’où émane une impression de stabilité. Par ailleurs, une sensibilité d’une extrême douceur affleure à la surface de la bouche, des yeux, des cheveux. De même qu’un espace infime existe entre l’apparence possible du visage et sa disparition imminente.

Dans cet esprit, la main de l’artiste s’est effacée pour laisser la place à la matière particulièrement pure du marbre ou du bronze. Finalement, l’être contenu dans cette forme ovale semble s’ouvrir à la conscience du monde.