L’art en Palestine, créer pour exister et témoigner.
L’art en Palestine, créer pour exister et témoigner.

L’art en Palestine, créer pour exister et témoigner.

Qu’ils perpétuent des formes artistiques traditionnelles comme la broderie ou qu’ils s’emparent des innovations les plus contemporaines, installations ou vidéos, sans négliger bien sûr la peinture qui reste le moyen d’expression dominant, la sculpture ou le graff, les artistes palestiniens dans leur ensemble expriment le désir de vie et de beauté de leur peuple et son refus de l’enfermement, malgré les épreuves et l’humiliation vécues au quotidien.

Aux côtés des cinéastes, photographes, musiciens, danseurs, et même de ces artistes en acte que sont les jeunes acrobates des toits qui « volent au-dessus du nid de check points » qu’est devenu leur pays, les plasticiens palestiniens, de l’intérieur comme de la diaspora, réaffirment la présence de leurs créations au cœur de l’art universel.

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« Le camp de réfugiés » par Alaa Albaba

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« Dans un pays où le sang de la rose est un martyr et le sang du martyr est une rose » par Rehaf Al Batniji

Khaled Husseyin, « I Miss You So Much » (Tu me manques tellement), Deir al-Balah, Gaza (2024).

Mustafa Mohanna, « Hope on the Road » (L’espoir sur la route), nord de Gaza (2024).

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Ayman Baalbaki, Al Moulatham, 2012, acrylique et tissu peint sur toile.

Juhaina Habibi Kandalaft, Jaffa, 2015, huilesurtoile, 200 cm x 200 cm.

« Mère et enfant » par Sliman Mansour, 2009

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Le tableau « Jamal Al Mahamel » de Sliman Mansour, 2005, est considéré comme l’œuvre d’art la plus célèbre d’un artiste du Moyen-Orient. Il représente un homme portant sur son dos le fardeau de sa nostalgie, ainsi que le poids de toute la cause palestinienne

C’est ce que fait l’artiste Sliman Mansour, l’un des doyens de l’art palestinien. Après avoir subi maintes fois la confiscation de ses œuvres, il continue d’affronter périodiquement les check-points israéliens pour se rendre de Jérusalem, où il vit, à son studio de Ramallah. Mansour, par son travail, se fait l’ambassadeur de la mémoire. Il met en scène le poids du souvenir à travers des toiles puissantes, telles que celle intitulée Jamal el Mahamel, considérée comme la plus célèbre toile d’un artiste moyen-oriental, et vendue chez Christie’s Dubaï en 2015. Une œuvre représentant un homme en exil croulant sous le poids du souvenir; un souvenir en forme d’œil, comme forçant à voir l’invisible: la nostalgie en bagage à perpétuité. «C’est aussi le poids de la charge émotionnelle, nous confie-t-il. Je ne suis pas réfugié, mais lorsque je vais à Jaffa, Acre, Haïfa ou en Galilée, je ressens la perte et les conséquences de la Nakba – exode forcé de 1948 que les Palestiniens ont subi – ; un sentiment qui se matérialise d’autant plus lorsque j’observe la manière dont ils sont traités, comme des étrangers ou des citoyens de seconde zone.» Un exil chronique à domicile.

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La femme palestinienne, symbole de vie et de force, « L’immigrant » de Sliman Mansour 2017

La femme palestinienne, arborant les tuniques brodées typiques des mères de son enfance, apparaît aussi comme une figure centrale dans nombre de ses œuvres. Symbole créateur de force, de vie, elle n’est pas sans rappeler la fameuse photographie de Frida Kahlo prise par Nickolas Muray en 1946 sur son rooftop new-yorkais, où la revendication ouverte d’une tenue si hors contexte se fait hymne révolutionnaire. Mais chez Mansour, la femme est surtout symbole d’une identité collective, et de sa perpétuation.

Dans d’autres de ses toiles, on retrouve de manière récurrente certains symboles clé de la Palestine tels que l’olivier, les agrumes, mais aussi le dôme doré et ce joyeux enchevêtrement de bâtisses, oasis d’insouciance, mirage de paix où terre et mère deviennent un même refuge, et dont on se demande s’il a réellement existé tant son souvenir semble lointain.

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« Solitude », Leila Shawa, 1988

Leila Shawa, artiste gazaoui, décédée en octobre 2022, reste considérée comme la mère de l’art révolutionnaire arabe, pour avoir proposé toute sa vie, par ses paysages naïfs, un souvenir poignant de cette chaleur d’un autre temps. Par ses toiles, elle laisse voir au monde la Palestine telle qu’on ne la verra plus. Une manière de dénoncer l’occupation, en figeant dans le temps un paysage alors qu’il faisait encore sens, alors qu’il n’était pas encore disloqué. Un paysage à la poésie bien particulière, ses fils électriques, passerelles, escaliers qui nous rappellent les liens de voisinage étroits, et plus généralement, d’interdépendance entre ses habitants.

Sliman Mansour, lui aussi, nourrit dans nombre de ses œuvres ce souvenir d’un âge d’or où Jérusalem et ses maisonnettes labyrinthiques dormaient dans une sérénité immaculée. Il nous confie néanmoins que dans ses dernières toiles, peintes durant les récents événements à Gaza, ses paysages se ternissent, jusqu’à devenir quasi monochromatiques.

Maher Naji, « Dabbka »

Le peintre gazaoui Maher Naji a, quant à lui, longtemps puisé son inspiration dans ses souvenirs d’enfance avant de quitter la Palestine pour étudier à Saint-Pétersbourg, et surtout, dans les récits de sa mère.
C’est ainsi que ses peintures se font silhouettes évanescentes, chantant les temps d’une histoire pleine et de légendes vives.
Ses toiles exposées au Palestine Museum de Woodbridge revêtent justement cette douceur, sous la devise de «laisser l’art et l’amour être notre langage commun».
Maher Naji confie: «Quand je vivais encore en Russie, j’étais influencé par le romantisme européen, et peignais plutôt l’incarnation de traditions, telles que des scènes de paysans dans les champs et de femmes dansant dans les mariages, car je suis aussi convaincu que l’histoire culturelle et civilisationnelle de tout peuple est un pilier pour la continuité de son développement.
Mais quand je suis retourné vivre à Gaza, mon travail a commencé à être plus intimement lié à la réalité dans laquelle je vivais.
C’est tout naturellement que l’artiste est l’enfant de son environnement.» Naji est revenu vivre en 1994 à Gaza, nourrissant dès lors un sentiment de double exil qui semble s’intensifier dans son travail au fil des toiles. On peut le voir dans sa série où les paysages palestiniens et russes se confondent et ne forment plus qu’un, comme pour réparer par l’imaginaire le déchirement fondamental.
Maher Naji explique: «En tant que Palestiniens, nous portons en nous la nostalgie, mais aussi la survie et le renouveau. Ainsi, l’attachement à un lieu remplace l’autre, et les nostalgies se font mutuelles.»

Ces dernières années, certaines de ses œuvres prennent un tournant inédit: celui de la révolution, de la colère. «Certes, quelques-unes de mes toiles expriment frontalement la résistance face à l’oppression, mais je préfère aborder le conflit existant entre mon peuple et l’occupant par des œuvres qui comportent un contenu historique ou mythologique et aller chercher une compréhension plus structurelle du conflit.»

Des symboliques secrètes devenues étendards
Nombre d’artistes palestiniens victimes ou témoins de la censure ont récemment adopté la pastèque comme élément symbole: un fruit que Sliman Mansour avait introduit dans ses œuvres, comme pied de nez au harcèlement constant des soldats quant au contenu considéré trop politique de ses toiles.

Ce fruit s’est fait, peu à peu, le substitut du drapeau palestinien dans la communauté artistique, du fait de ses couleurs vert, rouge, blanc et noir, permettant d’évoquer la Palestine d’une manière abstraite sans subir la censure.

Dans cette œuvre, Hajar Ali contourne la censure en illustrant la Palestine comme une pastèque rouge sang, murée, divisée en son cœur (Reverse Orientalism, 2023).

Le graffiti « Flying Balloon Girl » de Banksy orne le mur de séparation entre Israël et la Cisjordanie occupée depuis 2005 .

Plusieurs artistes internationaux ont eu le courage de dénoncer l’occupation au cours de leur carrière et d’apporter leur pierre à l’édifice de la paix.
Les fresques au pochoir de Banksy sur le mur de séparation sont aujourd’hui connues mondialement, dont son graffiti Flying Balloon Girl, qui n’est pas sans rappeler son autre œuvre Girl With Balloon, dont une reproduction avait fait l’objet d’une spectaculaire autodestruction lors de sa vente aux enchères à Londres, en octobre 2018 par Sotheby’s.

Une manière de rappeler que son message de liberté, son hommage à l’innocence de l’enfance et son appel à l’espoir ne sont pas à vendre, et qu’il ne cautionne pas le fait de voir son art extrait de son contexte situationnel et réduit au rang de produit.

Rebecca Odes, « War is not healthy for children » (La guerre n’est pas saine pour les enfants), 2023 .

L’aquarelliste new-yorkaise Rebecca Odes a, elle aussi, tenu à rendre hommage à l’enfance brisée, par deux séries de portraits d’enfants victimes des massacres et des prises d’otages, tant du Hamas que d’Israël, inspirées par la fameuse citation de la militante pacifiste juive américaine Lorraine Schneider: «La guerre est malsaine pour les enfants et tout être vivant.».
Une manière de montrer que l’empathie et le droit à la justice ne sont pas réservés à une ethnie plus qu’à une autre.

Certains rares peintres israéliens prennent parfois eux aussi le risque timide de prendre position pour la paix.

Mais les artistes israéliens les plus profondément engagés pour une Palestine libre restent pour l’instant des cinéastes et des auteurs.

Descendant artistique d’une lignée de cinéastes israéliens engagés tels qu’Eyal Sivan, qui avait su ouvrir la voie avec des films tels que «Jaffa, la mécanique de l’orange», ou encore «Izkor, les esclaves de la mémoire», le cinéaste israélien Yuval Abraham s’est permis de dénoncer très courageusement l’apartheid qui sévit contre des Palestiniens lors de la réception de son prix à la Berlinale le 24 février dernier, pour son documentaire «No Other Land».
Un discours qui lui aura valu une avalanche de menaces de mort.
C’est pourtant en aiguisant leur liberté de pensée que les artistes israéliens donneront l’exemple, en prouvant que les origines ne doivent pas faire de nous des pions, et qu’humanisme et esprit critique pèsent bien plus dans la balance de nos futurs qu’un patriotisme aveugle.

Jonathan Glazer après avoir remporté l’Oscar du meilleur film international (Jeff Kravitz).

Le réalisateur israélien Avi Mograbi a lui aussi défendu un documentaire fort lors de la récente dernière édition du Festival du Film et Forum International sur les Droits Humains (FIFDH) à Genève, dénonçant les pratiques colonialistes de son gouvernement.

La même semaine, le réalisateur londonien d’origine juive Jonathan Glazer appelait à une prise de conscience face au fléau de l’occupation lors de la réception de son Oscar pour son film « The Zone of Interest », traitant du thème délicat de l’Holocauste, en déclarant que son film avait justement pour but de montrer où la déshumanisation conduit.

Quant à la littérature, d’Ilan Pappé à Shlomo Sand, en passant par Avi Schlaïm, ces auteurs et historiens israéliens ont voué leur vie à dénoncer de manière référencée, et bien à leurs dépens, des vérités qu’ils ne pouvaient taire.
Ils mêlent ainsi leurs voix à celle d’auteurs palestiniens tels que Refaat Alareer, tué en décembre dernier dans un raid de l’armée israélienne, et dont le dernier poème qu’il aura livré au monde avant de mourir restera d’un message poignant: «Je suis toi».

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Majd Masri, « Hidden 2 », acrylique sur papier, 32x24cm (2022).

Majd Masri (née en 1991 à Jérusalem) est une artiste abstraite, qui a participé en 2016 au concours du jeune artiste palestinien de l’année au Mosaic Rooms de Londres.
Dans un courriel, elle écrit qu’elle « aime la mer et l’idée de nous, Palestiniens de Cisjordanie, qui ne pouvons pas être proches de la mer.
Nous sommes toujours entourés de postes de contrôle et devons obtenir une autorisation pour aller de l’autre côté de nos villes.
Je fais partie des millions de personnes qui cherchent des moyens d’échapper à cette réalité et une autre façon d’exprimer ces sentiments de chances perdues, limitées. »
Dans « Hidden 2 », elle reflète « les sons et les vagues de la mer en couleur dans la peinture, et trouve dans le ciel bleu un reflet de la compensation qu’elle recherche.
Dans les œuvres abstraites sans objets ni figures, la masse et le vide laissent un espace à la personne qui regarde l’œuvre pour poser des questions et éventuellement trouver des solutions. »
Un dessin de sa série « Haphazard Synchronizations » (2017) a orné la couverture de mon roman, Mother of All Pigs.
Masri a remporté la deuxième place du prix Ismael Shamout 2018 pour les arts visuels au Collège des arts et de la culture de l’université Dar al-Kalima, à Bethléem.

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Yazan Abu Salameh, « View from My Studio », encre et acrylique sur papier, 48x35cm (2022).

Né à Jérusalem en 1993, Yazan Abu Salameh a enseigné l’art dans plusieurs centres communautaires, notamment au camp de réfugiés Aidya à Bethléem.
Il a étudié les beaux-arts à l’université Dar al-Kalima et a participé à des expositions collectives en Palestine, en Jordanie et aux Émirats arabes unis.
Il a remporté le troisième prix de l’exposition « Let’s Make It Glow », organisée en 2019 par la municipalité de Turin, en Italie.
Il a exposé à la Ramallah Art Fair, en 2021 et 2020. Art Dubaï a récemment caractérisé son art comme une exploration des « géographies urbaines … dépeignant ce qui peut être vu comme des cartes miniatures qui reflètent les vestiges de souvenirs d’enfance, les blocages en béton et les tours de guet, ainsi que les quartiers palestiniens d’une vue à vol d’oiseau. »

En 2021, l’exposition solo de Salameh a eu lieu à la galerie Zawyeh, à Dubaï. Il vit et travaille à Bethléem.

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Nabil Anani, « Sabastiya », acrylique et techniques mixtes sur toile, 100x91cm (2022).

Nabil Anani (né en 1943 à Latroun, en Cisjordanie, en Palestine) est un artiste de premier plan et un partisan influent du mouvement artistique palestinien contemporain.
Né sous le mandat britannique, il a vécu la Nakba de première main. Il a assisté à la guerre des Six Jours de 1967 depuis l’Égypte et a atteint sa majorité en tant qu’artiste en Palestine pendant la première et la deuxième Intifada.
Avec Vera Tamari et Tayseer Barakat, il a créé le New Vision Movement, un mouvement d’artistes précurseur du mouvement BDS, qui boycottait les produits israéliens et utilisait des matériaux naturels – cuir, henné et teintures végétales – dans la création artistique.

Ses œuvres ont été largement exposées au Moyen-Orient, en Europe, en Amérique du Nord et au Japon.
Il est le lauréat du Prix du monde arabe pour les beaux-arts du Roi Abdallah II en 2006.

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Vera Tamari, « Torse féminin 1 », terre cuite, glaçure, engobe et sous-glaçure, 38x22x21cm (2006).

Vera Tamari (née en 1945 à Jérusalem) est une artiste multidisciplinaire, historienne de l’art islamique, commissaire d’exposition et éducatrice en art.
Elle est peut-être plus connue pour son installation de 2002 intitulée « Going for a Ride ? », dans laquelle elle a disposé des voitures écrasées par les chars israéliens, lors de l’invasion de Ramallah en 2002, sur un morceau de macadam à côté du terrain de football d’El Bireh.
De l’autre côté de la rue où elle vivait, l’artiste a vu les chars israéliens s’arrêter et leurs occupants fixer l’installation de voitures accidentées dans un embouteillage.
Elle a raconté au Guardian une semaine plus tard qu' »une cohorte entière de Merkavas est arrivée et les commandants des chars sont sortis et ont discuté de ce qu’il fallait faire. Puis ils sont remontés dans leurs chars et ont écrasé toute l’exposition, encore et encore, d’avant en arrière, la réduisant en miettes.
Puis, pour faire bonne mesure, ils l’ont bombardée.
Enfin, ils sont ressortis et ont pissé sur l’épave ».

Tamari, qui admire Duchamp, a filmé les Israéliens en flagrant délit et en a fait un événement artistique.

Les traditions locales en matière de poterie, notamment les grands pots hishash fabriqués par les femmes du village, ont inspiré l’artiste à ouvrir le premier studio de céramique en Palestine.

Elle s’est spécialisée dans la céramique en 1974, à l’Istituto Statale d’Arte per la Ceramica de Florence, en Italie, après avoir obtenu un diplôme de premier cycle en beaux-arts au Beirut College for Women, en 1966.
Elle a obtenu une maîtrise de philosophie en art et architecture islamiques à l’université d’Oxford en 1984 et a été pendant plus de vingt ans professeur d’art et d’architecture islamiques et d’histoire de l’art à l’université de Birzeit, où elle a fondé et dirigé la galerie virtuelle Paltel et le musée de l’université de Birzeit.

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Rana Samara, « Landscape Dream 1 », acrylique et peinture en spray sur toile, 53x58cm (2022).

Rana Samara (née en 1985 à Jérusalem) est une artiste, diplômée de l’Académie internationale d’art de Palestine, Ramallah, en 2015.
Un an plus tard, pour sa première exposition solo, « Intimate Space », à la Zawyeh Gallery, Ramallah, elle a interviewé des femmes du camp de réfugiés d’al-Amari sur la virginité, le désir sexuel, la relation et les rôles.
Sa deuxième exposition solo, « Inner Sanctuary », a eu lieu en 2022 à Zawyeh Dubai.

Samara a participé à un certain nombre d’expositions collectives et de foires d’art locales et internationales, notamment Contemporary Istanbul, en Turquie (2019) ; Art Dubai, aux Émirats arabes unis (2017 et 2019) ; Beirut Art Fair (2017) ; et Ramallah Art Fair (2020).

Connue pour ses peintures vibrantes d’espaces intérieurs, du salon à la chambre à coucher, Samara explore l’intimité dans la nature pour sa série « Landscape Dream ».

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Bashar Alhroub,  » Myth 1 « , encre et fusain sur papier, 39x29cm (2017).

Bashar Alhroub (né en 1978 à Jérusalem) travaille avec une variété de médias, notamment des dessins, des peintures, des photographies et des installations vidéo.
Selon son site web : Son art traite de « la polémique d’un lieu, en questionnant son rôle dans l’humanité et son influence sur la créativité … Son travail est profondément influencé par les sentiments sociopolitiques qui affirment l’identité de l’artiste ainsi que son désir d’appartenir à une communauté sociale et culturelle ; enracinée dans un lieu particulier. Alhroub aspire constamment à un sentiment d’attachement, à un sentiment de propriété significative de ce lieu ».

Son œuvre fait partie d’un certain nombre de collections et de musées internationaux.
En 2001, il a obtenu une licence en beaux-arts à l’université al-Najah de Naplouse.
Il a obtenu une bourse de la Fondation Ford pour poursuivre son master en beaux-arts, qu’il a terminé après avoir obtenu son diplôme de la Winchester School of Art de l’Université de Southampton, au Royaume-Uni, en 2010.

Ses œuvres ont été exposées par Mosaic Rooms, et il a été artiste résident à la fondation Delfina de Londres.
En 2012, il a reçu le premier grand prix de la 14e Biennale d’art asiatique du Bangladesh.

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Dina Mattar,  » Untitled 1 « , acrylique sur toile, 32x27cm (2019).

Dina Mattar (née en 1985 à Gaza) est une peintre originaire d’al-Bureij, un camp de réfugiés densément peuplé où ont eu lieu des assassinats judiciaires et des incursions de chars et d’hélicoptères de combat, des attaques et des agressions par les FDI.

Les peintures de Mattar ressemblent à des fables et sont audacieuses. « Mon utilisation de couleurs vives est une invitation à l’espoir, à l’optimisme et à la joie. Elles sont une indication que nous existons encore… Mon travail manifeste mon insistance et ma persévérance à exister, et à aimer la vie à travers tout ce qui est beau. »

Mattar a obtenu sa licence en éducation artistique à l’Université al-Aqsa de Gaza City, en 2007, et a participé à des expositions et des ateliers à Gaza en coopération avec la Fondation A.M Qattan et le Centre culturel français.

Elle a exposé au Liban, à Genève et en France.

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Tayseer Barakat, « Summer’s Rain », acrylique sur toile, 60x75cm (2020).

Tayseer Barakat (né en 1959, camp de réfugiés de Jabaliya, Gaza) est un artiste palestinien influent dont la vie et l’art ont été façonnés par la guerre, les conflits et les déplacements.
Sa famille était originaire d’al-Majdal, un village de Basse-Galilée qui a été rasé par les forces sionistes en 1948.
Il a passé ses années de formation dans le camp de réfugiés de Jabaliya, à Gaza.
Il a obtenu une licence en peinture au Collège des beaux-arts du Caire, à l’université d’Helwan, et en 1983, il est retourné en Palestine et a enseigné l’art au centre de formation des enseignants pour femmes de l’UNWRA à Ramallah.
En 1981, il a marché pendant quarante jours à travers la Cisjordanie, et a renforcé ses liens avec les villes et villages effacés par l’occupation.

Le travail de Barakat « est basé sur des recherches approfondies sur les arts anciens de la région dans son ensemble, s’inspirant des cultures cananéenne, phénicienne, mésopotamienne et égyptienne ancienne. Cependant, il n’adhère pas strictement à un style particulier. Sa pratique repose plutôt sur l’intuition, l’imagination et la dynamique de l’œuvre elle-même lorsqu’elle prend forme. »
Membre du mouvement New Vision, il a été le premier à utiliser les médias et l’artisanat locaux dans les beaux-arts.
Barakat est l’un des membres fondateurs du centre d’art al-Wasiti à Jérusalem-Est et de la salle al-Hallaj à Ramallah, de l’Académie internationale d’art de Palestine et de l’Association palestinienne d’art contemporain (PACA).

Ses expositions internationales comprennent la 6e Biennale de Sharjah (2003), l’Institut du Monde Arabe, Paris (1997), la Biennale de São Paulo (1996) et le Musée d’art moderne (1993).
Il vit et travaille à Ramallah.

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Khaled Hourani, « This Is Not a Watermelon », acrylique sur toile, 90x90cm de diamètre (2021).

Khaled Hourani (né en 1965 à Hébron, en Cisjordanie, en Palestine) est un artiste conceptuel, un conservateur et un écrivain influent.
Il a été directeur artistique et directeur général de l’International Academy of Art Palestine.
Il a également été le directeur général du département des beaux-arts du ministère palestinien de la Culture.

Il a reçu le prix Leonore Annenberg 2013 pour l’art et le changement social – Creative Time, à New York.
En 2014, il a organisé sa première rétrospective au CCA, Glasgow, et à la Gallery One, Ramallah.
Il a également organisé une deuxième rétrospective à Darat al-Funun, Amman, Jordanie, en 2017.

M. Hourani est à l’origine du projet Stone Distance to Jerusalem et de l’exposition « Picasso en Palestine » de 2011, une collaboration de deux ans entre l’Académie internationale d’art de Palestine et le Van Abbemuseum d’Eindhoven, aux Pays-Bas.
Le « Buste de Femme » de Pablo Picasso (1943) a été, contre toute attente, amené à Ramallah et exposé à un public palestinien, sous surveillance armée. Hourani a participé à de nombreuses expositions collectives et a été commissaire d’expositions en Palestine et à l’étranger.

Son œuvre humoristique « This Is Not a Watermelon » utilise les couleurs mêmes que les Israéliens ont interdit aux artistes palestiniens d’utiliser dans leurs œuvres.

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Malak Mattar a 23 ans. Elle est née et a grandi à Gaza.
Elle a commencé à peindre dès ses 13 ans quand elle est restée enfermée chez elle durant 51 jours à cause des tirs israéliens durant la guerre de Gaza.
La peinture est devenue pour Malak Mattar “un sanctuaire” pour raconter “les injustices” subies dans sa “prison à ciel ouvert”.
Ses toiles expressives et résistantes montrent des femmes en lutte qui demandent la liberté pour toutes et tous.

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A 86 ans, Samia Halaby est considérée comme une pionnière de la peinture abstraite.
Elle a fui la Palestine pour le Liban puis les États-Unis avec sa famille, après la Nakba en 1948.
Pour elle, la peinture est intrinsèquement liée aux sociétés dans lesquelles nous vivons et nous permet de nouvelles découvertes esthétiques.

Banksy, Garçon jouant avec un cerf-volant jetfighter (street art)

« S’il est écrit que je dois mourir… « 
Refaat Alareer était un poète, écrivain et professeur universitaire de littérature à Gaza. Militant, il a également co-fondé l’organisation We Are Not Numbers (Nous ne sommes pas des chiffres), qui met en relation des auteurs expérimentés avec de jeunes écrivains de Gaza. Il a écrit ce poème en anglais le 1er novembre 2023. Cet intellectuel gazaoui a été tué dans la nuit du 6 au 7 décembre 2023, ainsi que 7 autres membres de sa famille, lors d’un raid israélien qui a visé sa maison.

« S’il est écrit que je dois mourir
Il vous appartiendra alors de vivre
Pour raconter mon histoire
Pour vendre ces choses qui m’appartiennent
Et acheter une toile et des ficelles
Faites en sorte qu’elle soit bien blanche
Avec une longue traîne
Afin qu’un enfant quelque part à Gaza
Fixant le paradis dans les yeux
Dans l’attente de son père
Parti subitement
Sans avoir fait d’adieux
À personne
Pas même à sa chair
Pas même à son âme
Pour qu’un enfant quelque part à Gaza
Puisse voir ce cerf-volant
Mon cerf-volant à moi
Que vous aurez façonné
Qui volera là-haut
Bien haut
Et que l’enfant puisse un instant penser
Qu’il s’agit là d’un ange
Revenu lui apporter de l’amour

S‘il était écrit que je dois mourir
Alors que ma mort apporte l’espoir
Que ma mort devienne une histoire ».

Les sculptures de la Palestinienne Rana al-Ramlawi représentent la souffrance des Palestiniens

C’est à Gaza que l’artiste façonne son oeuvre humaniste impressionnante, d’une grande force évocatrice.

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Cette photo de Mohammed Salem, prise le 17 octobre 2023 à l’hôpital Nasser de Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, a remporté le premier prix du World Press Photo 2024. © Mohammed Salem.

L’image poignante d’une Palestinienne endeuillée tenant dans ses bras sa petite nièce, tuée lors d’une frappe israélienne dans la bande de Gaza, a remporté jeudi 18 avril 2024 le premier prix du World Press Photo.

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« Handala », personnage créé en 1969 par le dessinateur de presse Naji Al-Ali (1937-1987). 

Le personnage de Handala est emblématique de l’identité palestinienne. En haillons, toujours de dos, les mains jointes, il est le symbole de la ténacité d’un peuple dans l’attente d’un État. Quand celui-ci verra le jour, Handala montrera son visage.

L’éducation est une forme de résistance. Écolières à Rafah au sud de la Bande de Gaza ©Véronique Vercheval

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Comédie dramatique de Eran Riklis, 2008.
Salma vit dans un petit village palestinien de Cisjordanie situé sur la Ligne verte qui sépare Israël des territoires occupés. Sa plantation de citronniers est considérée comme une menace pour la sécurité de son nouveau voisin, le ministre israélien de la Défense. Il ordonne à Salma de raser les arbres sous prétexte que des terroristes pourraient s’y cacher. Salma est bien décidée à sauver coûte que coûte ses magnifiques citronniers. Quitte à aller devant la Cour Suprême afin d’y affronter les redoutables avocats de l’armée soutenus par le gouvernement.

Mais une veuve palestinienne n’est pas libre de ses actes surtout lorsqu’une simple affaire de voisinage devient un enjeu stratégique majeur. Salma va trouver une alliée inattendue en la personne de Mira l’épouse du ministre.

Entre les deux femmes s’établit une complicité qui va bien au-delà du conflit israélo-palestinien.

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Ce récit autobiographique retrace les années que l’auteur a passées en tant qu’étudiant aux États-Unis.
Il s’agit d’abord d’un voyage initiatique, au cours duquel l’auteur nous entraîne dans ses paysages intérieurs : perte d’évidence, quête perpétuelle du sens et surtout questionnement sur la folie, thème central du livre.
Fin connaisseur du patrimoine littéraire arabe et mondial, Hussein al-Barghouti restitue avec beaucoup de finesse, en alternant description, introspection et méditation, la tension constante entre ces deux parties constitutives de lui-même : l’imaginaire populaire palestinien et la modernité urbaine, théâtre de toutes les expérimentations.
« Probablement la plus belle réalisation de la littérature palestinienne en prose », écrit Mahmoud Darwich dans sa préface.

« L’oiseau de paix espère encore »

Colombe blindée de la paix, de Banksy, ou quand l’espoir de paix a besoin d’un gilet pare-balles .

C’est ainsi que, la peinture coulant directement des veines au pinceau, les mots, du cœur à la plume, l’art palestinien se pose comme une forme d’art qui naît par nécessité, ouvrant les yeux à celui qui s’obstine à les fermer.

Et l’on se rappelle alors qu’un dernier symbole, le plus parlant, dans la peinture palestinienne, reste la colombe.
Celle que Mahmoud Darwich évoquait dans son poème Un autre jour viendra, espérant avec ferveur à travers ses vers endoloris le jour où elles s’endormiront enfin sur les tanks abandonnés.

13 commentaires

  1. Gilles Fernandez

    Merci et bravo Véronique pour ce touchant dossier. Le gouvernement d’extrême droite religieuse et fasciste d’Israël est criminel et colonialiste. Merci de le rappeler par cette belle exposition d’artistes Palestiniens…💞

  2. Sylvia

    Très beau documentaire, d’une grande richesse artistique en nombre et en style de création. Il y a beaucoup de charge émotionnelle, surtout de la douleur et très peu d’espoir. En tant que mère, je sens le désespoir, la douleur et une envie puissante de preserver l’unité des familles en période de guerre. On dit que pour créer un artiste a besoin de souffrance, mais faut-il en arriver dans cette situation ?
    On n’est pas très familier au travail artistique qui vient de cette région.
    A revoir.

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